Mamadou Kiari Liman-Tinguiri : « Sortir de l’impasse au Niger »

Deux ans après le coup d’État qui a renversé le président démocratiquement élu Mohamed Bazoum, le Niger traverse une crise politique, sécuritaire et économique sans précédent. Dans une tribune percutante, Mamadou Kiari Liman-Tinguiri, ancien ambassadeur à Washington et universitaire, alerte sur les risques d’implosion du pays et propose des pistes pour renouer avec la stabilité.

Depuis juillet 2023, le régime militaire s’enferme dans des simulacres de légitimation et alimente une rhétorique anti-française, déconnectée des réalités économiques et géopolitiques. Pourtant, la souveraineté reste une coquille vide face à la montée des violences djihadistes et à une population en proie à une pauvreté extrême. Le désarroi social s’exprime aussi au sein des forces armées par des mutineries récurrentes.

Économiquement, le Niger est à bout de souffle : finances publiques exsangues, défaillances dans le paiement des opérateurs, sabotages du pipeline pétrolier et nationalisations préoccupantes minent la confiance des investisseurs. Le recours au décolonialisme apparaît davantage comme un écran de fumée qu’une stratégie viable.

Mamadou Kiari Liman-Tinguiri plaide pour un sursaut politique urgent, articulé autour de trois étapes : la libération sans condition des détenus politiques, la reconnaissance de l’échec militaire et l’organisation d’une convention nationale inclusive pour définir une sortie démocratique de crise. Ce « moment critique » est aussi une opportunité de bâtir un État efficace, porteur de développement et de paix.

🔍 Le regard de Com d’Afrik

Le diagnostic de Mamadou Kiari Liman-Tinguiri met en lumière l’ampleur du défi que traverse le Niger aujourd’hui, mais aussi la complexité d’une crise multidimensionnelle où politique, sécurité et économie s’entremêlent dangereusement. En tant que journaliste professionnel, il est évident que la stabilité de la région du Sahel dépend aussi de la capacité des dirigeants à dépasser les postures idéologiques et à privilégier des solutions pragmatiques.

Loin des slogans et des manœuvres politiques, la restauration de la démocratie ne peut être dissociée de la sécurité des citoyens et de la reprise économique. L’appel à une convention nationale inclusive souligne la nécessité d’un dialogue authentique, impliquant les forces vives de la nation, pour restaurer la confiance et tracer une feuille de route claire.

Par ailleurs, cette crise est un miroir pour l’ensemble de la région : elle révèle les limites des régimes militaires face aux défis complexes du Sahel et souligne l’urgence de repenser la gouvernance à l’aune des réalités locales et globales.

Enfin, l’absence de réponses internationales fortes renforce le sentiment d’isolement, mais elle souligne aussi que les solutions durables devront nécessairement émerger des dynamiques internes, portées par un leadership éclairé et responsable.