Com d'Afrik

Gabon : une croissance à deux chiffres visée… mais des réalités économiques à trois vitesses

Selon la Banque mondiale, entre 1995 et 2020, la richesse nationale du Gabon a augmenté de 35 %. Mais dans le même temps, la richesse par habitant a chuté de près de 35 %. Une statistique qui résume à elle seule un paradoxe national : le pays s’est enrichi… sans enrichir ses citoyens.

L’institution internationale est formelle : le Gabon peine à convertir ses ressources naturelles en investissements productifs et en capital humain durable. Un constat sévère, mais révélateur d’un modèle de croissance déséquilibré.

Ce diagnostic entre en collision avec les ambitions affichées dans le document de cadrage budgétaire 2026-2028, qui table sur une croissance économique moyenne de 3,3 %, avec un objectif de croissance à deux chiffres d’ici à 2028. Des prévisions jugées optimistes, alors même que les moteurs structurels de transformation restent faibles : dépendance persistante aux hydrocarbures, investissement public en berne, et érosion de la demande intérieure face à la vie chère.

La Banque mondiale alerte aussi sur un appauvrissement du capital national :

  • Le capital naturel non renouvelable par habitant a baissé de 33 %
  • Le capital produit (infrastructures, équipements, etc.) de 10 %

Une trajectoire qui met en question la durabilité même du modèle économique actuel.

🔍 Le regard de Com d’Afrik

Au-delà des chiffres, ce débat révèle un mal plus profond : une gouvernance économique restée prisonnière du réflexe extractiviste. Malgré les discours et les plans, le pétrole demeure le cœur battant des finances publiques, représentant encore 43 % des recettes prévues en 2026. Or, un cœur qui bat au rythme des cours mondiaux ne permet pas de bâtir une économie souveraine.

Le contraste est d’autant plus criant que l’Étude prospective Gabon 2050 trace une voie claire : investir dans le capital humain, transformer localement les ressources, et réinventer l’État comme facilitateur du développement. Mais cette vision se heurte à une inertie institutionnelle bien ancrée.

La promesse d’une croissance à deux chiffres risque ainsi de rester une illusion statistique si elle ne s’accompagne pas d’un véritable choc structurel : réformes fiscales, meilleure exécution des budgets, transparence, et surtout, recentrage sur l’humain. Car sans une colonne vertébrale faite d’éducation, de santé, et d’opportunités locales, la croissance restera un chiffre… et non une réalité vécue.

 

Leave a comment

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *