Le 30 mai dernier, lors du Conseil des ministres présidé par Brice Clotaire Oligui Nguema, une décision majeure a été prise : l’interdiction
Le 30 mai dernier, lors du Conseil des ministres présidé par Brice Clotaire Oligui Nguema, une décision majeure a été prise : l’interdiction d’exporter le manganèse brut à partir du 1er janvier 2029. Cette mesure historique vise à renforcer la valeur ajoutée locale en imposant la transformation du minerai sur le territoire gabonais, marquant une étape décisive dans la stratégie industrielle du pays.
Face à ce tournant, la Commission interministérielle de suivi du projet intégré de transformation locale du manganèse s’est réunie à Libreville sous la présidence du vice-Premier ministre Alexandre Barro Chambrier. L’objectif : définir une feuille de route pour relever les défis liés à cette ambitieuse politique industrielle, en cohérence avec la vision minière africaine adoptée en 2009 et la loi gabonaise n°037/2018 consacrant le secteur minier comme stratégique.
Le Gabon, riche en ressources minérales, amorce ainsi sa transition d’une économie de rente vers une industrialisation plus avancée. Le contraste est saisissant : le minerai brut se vend environ 4,45 dollars la tonne, tandis que le silicium manganèse, produit issu de la première transformation, atteint près de 996 dollars. L’enjeu est donc économique mais aussi souverain : reprendre le contrôle de la chaîne de valeur pour bâtir une industrie compétitive et durable.
Le ministre des Mines, Gilles Nembe, rappelle que cette décision s’inscrit dans un cadre plus large avec trois autres projets phares annoncés fin 2024 : le chemin de fer Belinga-Booué-Mayumba, la centrale hydroélectrique de Booué et le port en eau profonde de Mayumba. Ces infrastructures stratégiques conjuguées à la transformation locale du manganèse pourraient créer jusqu’à 165 000 emplois, dynamisant ainsi l’économie gabonaise.
Le regard de Com d’Afrik
La décision d’interdire l’exportation du manganèse brut est un signal fort envoyé à la fois aux investisseurs et aux partenaires internationaux : le Gabon veut sortir du modèle traditionnel de rente minière pour embrasser une industrialisation ambitieuse. Cette politique est porteuse d’espoir mais soulève aussi de nombreuses questions opérationnelles.
En effet, la transformation locale nécessite des infrastructures robustes, des compétences techniques adaptées et un environnement économique stable pour attirer les investisseurs. Le défi est double : éviter les pièges d’une industrialisation rapide mais mal planifiée, et garantir que les retombées économiques bénéficient réellement aux Gabonais, en termes d’emplois et de développement durable.
Cette stratégie pourrait donc être un véritable levier pour diversifier l’économie gabonaise et renforcer sa souveraineté industrielle. Mais elle impose une coordination rigoureuse entre acteurs publics et privés, un engagement ferme dans la formation et l’innovation, ainsi qu’une transparence renforcée dans la gestion des ressources.
Le Gabon est à un carrefour historique : il peut choisir de devenir un acteur majeur et respecté dans la transformation minière africaine, ou risquer de rester dépendant des exportations brutes. La feuille de route tracée aujourd’hui doit être suivie d’actions concrètes pour faire de cette ambition une réussite tangible.
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